Stratégie

Grumpy Cat ou Comment générer des millions à partir de (presque) rien

Il était une fois un chat qui avait une bouille si incroyablement grincheuse que, par un beau jour de septembre, il y de cela six ans, le frère de sa propriétaire décida de l’immortaliser et de poster sa photo sur reddit, pour que tout le monde puisse le voir. Il avait l’air tellement grognon ! Le chat, de son vrai nom Tardar Sauce, est très vite devenu une sensation sur Internet. De nombreux internautes créèrent des mèmes à partir de cette photo, en y ajoutant une légende amusante ou juste sympa, et la republiant ainsi modifiée pour que les gens puissent rigoler et diffuser le mème plus loin.

 
La propriétaire du chat grincheux, alors serveuse dans un restaurant de l’Arizona, su immédiatement flairer la bonne affaire. Suite au buzz généré par la photo sur Internet, elle monta une société : la bien nommée « Grumpy Cat Limited ». S’ensuivit alors un business ôcombien lucratif de fabrication et vente de tout un éventail de produits à l’effigie du chat grincheux : stylos, tasses, calendriers et même un New York Times best-seller. Le chat grincheux avait désormais sa propre chaîne YouTube, son site internet et ses comptes Instagram et Facebook. Il était même devenu une vedette de télévision!
 
C’est donc ainsi que le chat grincheux devint célèbre et sa propriétaire plus riche encore que le marquis de Carabas. Ou presque… Personne ne pouvait dire exactement combien ils avaient gagné : un million – cent millions? Qui sait ? Le chat, en tout cas, n’en pipe mot. 
 
Ce qui est certain, c’est que la propriétaire du chat grincheux ne s’était pas laissé distraire par des histoires de contes de fées. Si apposer une simple image de chat sur des objets d’utilisation courante pour les vendre pouvait lui rapporter beaucoup d’argent, la réalité dépasserait rapidement la fiction une fois que d’autres auraient flairé l’aubaine. Et il ne faudrait pas que n’importe qui puisse utiliser l’image du chat grincheux !
 
Pour ce faire, il faudra d’abord demander l’autorisation à sa propriétaire. Et ne vous en faites pas : « Grumpy Cat Limited » est là pour vous en expliquer les règles. Enfreindre ces règles… enfin, n’y pensez même pas ! Vous voyez, la propriétaire a fait en sorte de protéger son chat d’une véritable forteresse de droits de propriété intellectuelle : droits d’auteur, marques, accords de licence – tout ceci vous permettant de participer au business du chat grincheux, mais pas de faire des affaires sur son dos !  Sinon, c’est devant un tribunal qu’il faudra s’expliquer et peut-être devoir payer beaucoup d’argent au chat grincheux.
 
« Grenade Beverage LLC », une société californienne qui avait conclu un contrat avec « Grumpy Cat Limited » dans le but de vendre des cafés glacés « Grumpy Cat Grumppuccino », en a d’ailleurs récemment fait l’amère expérience. Ayant volontairement outrepassé les droits qui lui avaient été accordés par le contrat, en commercialisant du café torréfié à l’image du chat grincheux, la société s’est vu intenter un procès pour violation de droits d’auteur, violation de marque, violation de contrat et même cybersquattage. Décision du jury ? Il faudra maintenant verser à « Grumpy Cat Limited » plus de 700.000 dollars de dommages et intérêts. Ce qui fait, quand même, pas moins de 175.000 Grumppuccinos ! De quoi avoir une indigestion…
Et vous pouvez imaginer à quel point le chat grincheux et sa propriétaire sont ravis d’avoir protégé leur propriété intellectuelle en temps opportun. Non seulement la sécurisation des droits de propriété intellectuelle de son entreprise a-t-elle contribué à établir la place du chat sur le marché (combien d’autres félins peuvent prétendre être à la tête d’un empire commercial ?), mais cela signifie aussi que l’entreprise bâtie autour du chat peut protéger sa marque et prendre des mesures significatives contre tous ceux qui oseraient profiter indûment de la renommée du chat grincheux.
 
Voilà donc l’histoire du chat qui a bâti un empire commercial sur la base de droits de propriété intellectuelle. Enfin presque, sa belle gueule y étant évidemment pour quelque chose… Mais quelle est la morale de l’histoire ? Tout entrepreneur qui pense avoir un concept méritant d’être mis sur le marché devrait protéger ses droits de propriété intellectuelle, comme si son entreprise générait déjà des revenus. Peu importe si le concept est aussi simple que de mettre une photo de chat sur une tasse ou un t-shirt et de la vendre. Vous ne savez jamais si, quand, ou de quelle façon spectaculaire votre entreprise va décoller. En outre, si vous croyez suffisamment à la valeur de votre idée pour consacrer du temps, de l’énergie et du capital pour la présenter à des investisseurs et autres, vous devriez aussi penser à ce qui pourrait arriver à votre entreprise si vous ne protégez pas votre propriété intellectuelle. Pensez-y : si vous n’êtes pas protégé, vous pourriez être laissé sur le bord de la route, tandis que d’autres sont occupés à faire de l’argent sur votre dos. Et alors vous auriez vraiment une raison d’être grincheux.
 
 
 

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