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Superproduction : Derrière les photos, l’exigence

Installée au cœur de Genève, Superproduction est une agence spécialisée en achat d’art et en production photographique. L’expérience internationale de ses co-fondatrices et la richesse de leur carnet d’adresses leur permet d’offrir à leurs clients des solutions sur-mesure.

« Notre bureau, c’est avant tout nos laptops connectés sur skype en permanence », plaisantent Nixe Jankow et Raquel Staedler, qui s’y retrouvent surtout le matin pour des séances de brainstorming. Les rendez-vous, elles préfèrent les donner à l’extérieur. De retour à Genève après plusieurs années à l’étranger, les deux jeunes femmes ont acquis une solide expérience dans l’achat d’art, respectivement pour les domaines de la mode et de la grande distribution. L’une serait plutôt cérébrale et esthète – elle a obtenu un DEA en art contemporain à la Sorbonne avant de travailler plusieurs années pour Art&Commerce (New York), l’une des plus grandes agences de photographes au monde – ; l’autre est surtout une commerciale à l’aise sur le terrain. Est-ce son expérience dans la grande distribution qui a forgé son caractère ? « Raquel ne se laisse jamais démonter par les inévitables petits problèmes rencontrés lors d’un shooting.  Son calme rassure beaucoup les clients », relève sa partenaire. Si cette complémentarité fait indéniablement leur force, il n’y a pas pour autant de répartition précise des tâches au sein de l’agence. Chacune peut « prendre le lead » sur un mandat.

Savoir anticiper
« Quand notre client est une entreprise, il attendra surtout de nous une prise de position, alors qu’avec une agence, ce sera surtout une recherche de solutions », expliquent les associées. Sur la base d’un brief et d’une maquette, l’objectif sera de fournir à l’un ou à l’autre le meilleur photographe et la meilleure équipe au meilleur prix. Un exercice qui peut s’avérer de haute voltige et qui nécessite un solide sens de l’anticipation. « Nous sommes très conscientes des risques et cherchons à les limiter au maximum. L’une de mes équipes était en extérieur à New York le 11 septembre, j’étais en Espagne lors du nuage du volcan ; il nous est aussi arrivé d’avoir quinze jours de pluie alors qu’il était censé n’y en avoir jamais plus de deux », se souvient Nixe Jankow. Pour gagner du temps dans la phase d’achat d’art, Superproduction proposera généralement à son client trois books de photographes correspondant étroitement à l’esprit du projet. Après le choix et la validation du photographe, intervient la phase de production. Il s’agira de définir le lieu du shooting et de réunir une équipe de mannequins, maquilleurs, coiffeurs, voire restaurateurs et chauffeurs dans certains cas. Rien n’est laissé au hasard, tout demande une capacité constante d’anticipation. Les repérages en extérieur par exemple, « une des phases les plus stimulantes de notre activité », sont presque toujours réalisés par les associées elles-mêmes. Tout sera vérifié sur place : nécessités et commodités d’accès, possibilités de séjour à proximité, restauration adaptée, conditions météo ou encore impératifs de cadrages. Surtout quand il s’agit de réunir, dans le cas d’un mandat de production exécutive pour Bally et dans un cadre temporel minuté, une équipe de vingt-cinq professionnels ultra-sollicités sur un site de montagne. « Malgré tout le travail en amont, on a connu quelques drames, par exemple lorsqu’un cuisinier a apporté les œufs avec un quart d’heure de retard. »

Liberté artistique
Contrairement à une agence de photographes, dont l’objectif consiste à placer l’un de ses « protégés » sur chaque nouveau projet, Superproduction jouit d’une totale liberté dans ses choix artistiques. Elle fonctionne ainsi comme une externalisation d’un service dont les grandes agences de communication disposent parfois à l’interne. Comment choisit-on un photographe ? « Quel que soit son style, un photographe doit être techniquement bon. C’est un pré-requis. Certaines faiblesses peuvent être corrigées en post-production, mais de loin pas toutes! » Superproduction ajoute à cela une liste de dix ou quinze critères qui lui permettent d’objectiver les forces et les faiblesses d’une photographie : la maîtrise de la lumière, bien sûr, mais également le cadrage ou le choix des mannequins. Son propre positionnement en tant qu’agence ? « A Genève, la spécialisation ne serait pas raisonnable. Nos clients « luxe » acceptent parfaitement que l’on fasse également de la pub. Par contre, bien que nous pourrions proposer également du film publicitaire, nous nous limitons à la photographie. Cette clarté-là les rassure. » Parfaitement au courant des trends internationaux, Superproduction entretient des relations suivies avec les milieux des photographes. Elle est ainsi en mesure de solliciter très vite ceux dont la spécialité entre en adéquation avec les exigences de la maquette, en tenant compte du budget. Avec l’agence Trio, les associées travaillent par exemple, pour Manor, sur des catalogues de décoration, de bijoux, de mode à plat ou de parfums. En proposant plusieurs books précis pour chaque catégorie dès la réalisation de la maquette, le client peut ainsi se faire tout de suite une idée précise du résultat. Les questions pratiques – shooting studio ou en extérieur ? récupération ou création d’un décor ? – ne sont dès lors plus traitées qu’avec le photographe.

Les atouts de la Suisse
Les exemples sont nombreux de marques internationales qui choisissent la Suisse pour leurs shootings. « Tout d’abord, c’est beau, la Suisse. On a de la neige toute l’année, ce qui évite par exemple de devoir créer un décor hivernal en plein été. Ensuite, la variété des repérages est incroyable : montagnes, lacs, régions très différenciées. » Une autre motivation des marques, notamment Rolex, peut consister en la présence sur place de leurs ambassadeurs ; ou encore parce que c’est la Suisse en tant que telle, comme pour Bally, qui fait partie du concept de la campagne. Mais il y a un bémol : le franc fort. Le secteur de la grande distribution, par exemple, qui fonctionne sur la base de grilles tarifaires, optera plutôt pour le professionnalisme et le rendement de Miami ou de l’Afrique du Sud. Les atouts des photographes suisses eux-mêmes ? « L’horlogerie, bien sûr, et il y a aussi de bons photographes de mode, mais les meilleurs sont souvent à l’étranger. » Quant aux agences d’achat d’art, très peu nombreuses en Suisse romande, elles semblent avoir de beaux jours devant elles.

Gauthier Huber

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